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Edgar Morin et l’aventure du siècle

Edgar Morin

Doctorant au Centre d’études et de recherche sur les risques et les vulnérabilités (CERReV) de l’université de Caen Normandie, Pierre-Alexandre Delorme est spécialisé en sociologie et anthropologie. Son travail de thèse est consacré aux ruptures et continuités de l’ordre social et propose une théorie socio-anthropologique de la transgression. Dans le cadre de la Bourse Imec/Crédit Coopératif, il s’est intéressé spécifiquement à la théorie de la transgression et à l’originalité de la démarche d’Edgar Morin, « penseur des crises caractéristiques de la modernité ». Dans les archives conservées à l’Imec, il a travaillé en particulier sur un ensemble de documents liés à l’enquête sociologique menée par Edgar Morin sur le village de Plozévet, miroir des mutations du monde rural.

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Archives Edgar Morin

« Morin, bien sûr. Empêcheur de tourner en rond, comme son semi-homonyme, qui peuple le ”perchoir” de l’Assemblée. Non-conformiste et inconfortable, dans son territoire personnel de sociologue, entre les divers groupes – jeunes carnassiers des sciences humaines, trissotins de la mode, chercheurs traditionnels et dialecticiens surgelés – qui se méfient de ses audaces de franc-tireur et de solitaire. Et pourtant increvable. Lu. Parce que, envers et contre tous, il a quelque chose à dire. Parce qu’il ne se contente pas, performance usuelle, de démontrer à 99,6% ce qu’on savait déjà auparavant, de source sûre, à 98,2%. Parce qu’il annexe d’un coup à sa discipline – et à sa province – des continents mal défrichés où nul, du moins en France et dans sa spécialité, n’avait encore eu l’idée, ou l’audace, de s’aventurer. [1] »
Emmanuel Le Roy Ladurie

Le nom d’Edgar Morin résonne tout au long du XXe siècle, sporadiquement mais avec éclat. Il continue de retentir dans notre début de siècle. Pourtant, qui est Morin ? On nous dira qu’il est sociologue, anthropologue, philosophe, penseur politique, penseur de la complexité, homme de revue, résistant et militant, écrivain… Sociologue, Morin l’est de formation, mais il en a très souvent récusé l’appartenance disciplinaire, préférant le terme d’anthropologue [2]. Philosophe, il l’est aussi, comme en témoignent ses qualités d’épistémologue, sa connaissance de Spinoza, de Hegel ou d’Heidegger. On confond d’ailleurs souvent le philosophe avec le penseur politique, présent sur la scène médiatique, contributeur régulier au journal Le Monde, commentateur de son temps et des conflits si nombreux qui tailladent son siècle. Comment lui refuser la dénomination d’homme de revue ? L’aventure d’Arguments, la longue période de Communications, ses nombreuses participations, sa présence au sein de comité scientifique de revues amies comme Prétentaine [3], témoignent de son intérêt pour la presse scientifique. Son engagement dans la Résistance, et avant cela dans l’antifascisme libertaire dès 1936, poursuivi par des prises de positions militantes pour la défense du peuple algérien, sa proximité avec les mouvements de Mai 1968, et plus récemment de Nuit Debout, lui confèrent sans nul doute l’étiquette d’un penseur engagé. Écrivain de roman enfin, très récemment et pourtant depuis si longtemps[4]. Morin est peut-être tout à la fois, ou en définitive rien de tout cela. Morin n’est peut-être que Morin, et parce qu’il n’est peut-être que lui-même, il intéresse.

Fruit d’un siècle mutilé, Edgar Morin fait figure de marginal, de ces « incasables » dont Jean Duvignaud, son ami, parlait en 1975.

« On ne peut être heureux à vingt ans. Nizan l’a dit. On veut être avant d’être quelqu’un. On pressent que les choses qui sont pourraient et devraient être différentes. On attend. Rien ne vient, sinon ce que la société des adultes vous offre : le mariage, le métier, le travail productif, la division du travail. On est coincé. Ou bien alors, on veut conserver quelque chose de cette indétermination. On fuit hors des normes. On trahit sa classe et les « sacrifices consentis ». Hors-la-loi, aventurier, hérétique : on accepte d’être incasable. Les plus adroits se font artistes ou intellectuels : c’est le moyen de tourner les différences de classe.[5] »

En effet, parler de Morin revient à parler de marginalité. Dans Comprendre Edgar Morin, Jean-Baptiste Fages écrivait que « Morin se met hors classement, se marginalise délibérément vis-à-vis de toutes les patentes institutionnelles, de toutes les disciplines reconnues »[6]. Pourtant, il n’a eu de cesse de fréquenter des écoles, des courants, sans y souscrire mais en y contribuant. Il est ainsi devenu ce marginal que tout le monde connaît. Rares sont en effet les bibliothèques qui ne comprennent pas dans leurs rayons l’un de ses très nombreux ouvrages.

À travers nos recherches menées entre janvier et juillet 2017 à l’Abbaye d’Ardenne dans le cadre du programme « Edgar Morin » de la bourse de recherche lancée par l’Institut Mémoires de l’Edition Contemporaine et le Crédit Coopératif, nous avons souhaité analyser l’œuvre morinienne à partir de trois aspects majeurs qui lui donnent sa couleur, à savoir son caractère programmatique et ancré dans l’époque, son irréductibilité aux frontières politiques et académiques par souci d’anti-dogmatisme et par goût de la transdisciplinarité et enfin la marginalité-incluse de l’œuvre et du penseur, le goût de Morin pour ce fonctionnement à la commensalité et sa non-appartenance aux écoles théoriques qu’il a fréquentées ou générées. Cette taxinomie de l’œuvre morinienne nous a poussé à analyser le phénomène Morin avec un intérêt pour l’œuvre en tant que dynamique rupturiste, fonctionnement collectif et processus génétique.

Cette grille d’analyse visait à identifier l’originalité de Morin, tant dans le paysage institutionnel et académique que politique. Nous avons souhaité nous centrer sur la réception de l’œuvre et sa diffusion, interroger l’aspect polémique, se demander en quoi l’œuvre marginale de Morin intéresse la connaissance et si l’on peut seulement parler d’une œuvre marginale ?

Heureux qui comme Edgar a fait un beau voyage

« C’est en effet à ces Cyclopes, monstres monoculaires, à la vision tronquée et réductrice, produits pas la science moderne, qu’Ulysse-Morin livre son combat le plus acharné, afin de faire triompher une vision binoculaire, pleine et panoramique (au sens premier) de l’homme [7] »

À l’image d’un Marcel Mauss, Morin questionne, explore. Comme Mauss, on lui reprochera de ne pas toujours aboutir à des conclusions fermées. Ses thématiques sont variées et nombreuses, ses centres d’intérêts, ses influences, changent, se succèdent, se superposent, s’imbriquent, divergent, s’interrogent les uns les autres, se critiquent. Il se nourrit d’une pluralité de pensée, c’est ce qu’il appelle son travail de reliance, une capacité à « butiner de-ci de-là »[8]. Si Morin donne cette impression de naviguer à vue c’est bien pourtant en anticipateur et avec une fine compréhension de l’époque qu’il se révèle. C’est aussi vers son Ithaque qu’il vogue, vers une connaissance pleine et entière de l’Homme, vers une anthropologie.

En effet, lorsque Morin aborde une nouvelle thématique, ce n’est jamais en sociographe qu’il s’y attelle. À partir d’objets souvent peu estimés par la discipline, il s’attache à produire une connaissance de l’Homme moderne et ses mythes à travers Les Stars ou Le Cinéma ou l’homme imaginaire. C’est en effet un double projet que porte Morin : d’une part la constitution d’une anthropo-logie pluridisciplinaire, prête à sacrifier l’hyperspécialisation et à démultiplier les approches, les objets ; d’autre part la légitimation de certains objets dont peuvent et doivent s’emparer les sciences de l’homme.

Tout ceci nécessite une approche singulière que Morin ne va avoir de cesse de développer, celle d’une science évènementielle, au sens même où il définit l’évènement du point de vue de l’histoire des idées :

« […] selon un paradoxe que l’on retrouve souvent dans l’histoire des idées, c’est au moment où une thèse atteint les provinces les plus éloignées du point de départ, c’est à ce moment même que s’opère une révolution, au point de départ précisément, qui infirme radicalement la thèse. [9]

Il s’agit, dans une période marquée par le structuralisme régnant, tant de s’intéresser à l’évènement, que de faire évènement. En tant que phénoménologue, il construit donc une sociologie du présent, attentive à l’évènement, à la crise, à « ce monstre de la sociologie [10] ». Car la crise est ce moment où tout se donne à voir, où le temps suspend son vol, où tout peut se redéfinir. Bien que la crise puisse « se résoudre dans le retour in statu quo ante, […] le propre de la crise est de déclencher la recherche de solutions nouvelles [11] ». C’est donc bien dans l’ici et le maintenant de la crise que le sociologue peut observer la manière dont le social se fait. Ceci ne signifie pas qu’il doit pour cela oublier comment il se maintient. Morin, en pluridisciplinaire, invite à s’interroger sur la crise comme autre chose que ce qui perturbe, mais comme l’irruption des antagonismes virtuels et contrôlés d’une organisation pensée sur le modèle systémique, cybernétique et néguentropique. Un des effets de la crise est de déclencher une activité de recherche dans la mesure où la crise montre les dysfonctionnements. Elle met en relief les antagonismes fondamentaux et en ce sens, le concept morinien de crise recouvre la même valeur heuristique que le fait social total chez Mauss, la capacité de saisir l’ensemble des institutions, le social tel qu’il se fait, tel qu’il se désorganise et se réorganise. Chaque crise est l’occasion d’une mise en question, d’interroger des phénomènes variés – la guerre, la mort, la rumeur, la jeunesse, la consommation… Face à la succession de plus en plus rapide des crises, face aux problèmes que posent la modernité et ses incertitudes, Morin fait le pari d’une méthode qui permet d’aller vers de nouveaux objets : l’autorévision et l’autocritique.

Il est intéressant de voir comment Morin choisit ses enquêtes ou ses objets. Toujours à contre-courant, il va chercher dans les périphéries des sciences ce qu’il juge intéressant pour amener une compréhension de l’époque. C’est aussi avec des méthodes nouvelles ou révisées qu’il entend appréhender chaque nouveau terrain. Son Autocritique fut l’amorce d’une réflexion plus générale sur la condition du chercheur que Morin n’a eu de cesse de tenir et dont de nombreux chercheurs, sans toujours le savoir, se font les héritiers et les continuateurs. Car Morin, s’il entend fonder une sociologie du présent, se pose en contemporain de ce présent. S’il veut « coperniciser la mort [12] », c’est qu’il en connaît aussi l’angoisse. S’il choisit d’entamer le projet d’une anthropo-logie, il est aussi anthropos. En somme, l’autocritique doit être le travail du chercheur dans sa relation à son propre objet.

« Ici encore, il faut répéter, ressasser que la relation à l’objet de la recherche pose, au chercheur, un problème d’autocritique permanente. Sa tendance naturelle est d’oublier la relativité fondamentale de cette relation, d’oublier que le regard du chercheur est modifié par le phénomène observé et que la personne du sociologue se situe dans un champ sociologique déterminé. [13] »

La construction de sa réflexion sur l’autocritique n’est certainement pas étrangère aux lectures freudo-marxistes de Morin ; du moins elle en incarne l’hétérodoxie. Dès les premiers temps de sa carrière de sociologue, il dérange par ses pratiques et ses fréquentations marginales. Proche des courants psychosociologiques, il entamera l’enquête sur La Métamorphose de Plozévet auprès de l’un des instigateurs de l’analyse institutionnelle : son ami subversif Georges Lapassade [14]. La pratique d’une sociologie d’intervention, quinze ans avant que les chantres de la sociologie instituée s’emparent de la question, fut une manière de rompre les habitudes de la sociologie classique, de penser de nouvelles méthodes adaptées à l’objet. Morin dira d’ailleurs : « [J’ai été] marginal quand régnait la sociologie sur questionnaires, alors que j’ai privilégié le contact direct et la méthode d’immersion comme par exemple dans l’étude de la commune de Plozévet ; je le suis resté avec la sociologie du présent et de l’événement. [15] »

L’autocritique est aussi l’occasion pour le chercheur de savoir quand une recherche doit s’arrêter. En un sens, faire son autocritique, c’est parfois savoir accepter l’autodissolution, la fin d’un projet. Elle est aussi élaboration collective dans la mesure où, en faisant son travail d’introspection, le chercheur doit aussi étudier les sentiments du groupe de recherche, des enquêtés, mais également savoir se confronter à d’autres regards que le sien[16]. L’autodissolution d’Arguments fut sans doute le meilleur exemple de cette pratique d’autocritique. En 1962, Morin fait paraître le texte « Il faut savoir terminer une revue », texte dans lequel il revient sur la manière dont Arguments et ses membres se sont éloignés de leur projet initial, cédant aux sirènes de l’encyclopédisme et délaissant l’évènement. Ce texte n’est que l’officialisation d’une autocritique collective amorcée en 1960. Le 23 octobre une lettre signée de Jean Duvignaud, Pierre Fougeyrollas, François Fejtö et Kostas Axelos est adressée à Morin. Jean Duvignaud, rédacteur de la lettre, rapporte leurs inquiétudes, à savoir que Morin ne donne plus de temps à la revue, qu’elle n’occupe plus la place importante qu’elle avait dans sa vie. C’est aussi affectivement qu’ils choisissent de lui écrire :

« Cher vieux, je sais bien que tu es surchargé, mais je tiens tout de même à te rappeler que la revue ne correspond plus du tout à ses principes de départ : elle devait être une revue de groupe, naissant de discussions intérieures et de conversations véritables ; or nous affermons tous les numéros et nous en traitons les contenus avec une légèreté désarmante […].  Cela est d’ailleurs normal puisque l’affectivité qui devait supporter nos rapports et notre expression dans la revue n’existe plus depuis tantôt deux ans. C’est donc la porte ouverte aux numéros spéciaux (qui sont la mort lente des revues) aux numéros encyclopédiques (qui ne le sont jamais assez, ou le sont trop schématiquement), aux numéros inactuels ou bâclés. Comme nos rencontres ne sont que des rencontres vides au cours desquelles nous ne parlons plus du tout de ce que nous pensons ou cherchons à penser, mais où nous jouons à jouer comme des étudiants, nous glissons peu à peu vers la stérilité. [17] »

Ils abordent donc pour la première fois la question de l’autodissolution. Fin 1961, quelques mois avant l’autodissolution d’Arguments, Jean Duvignaud se livrera à une nouvelle autocritique, revenant sur l’égarement général de la revue, sa distance d’avec le projet initial [18]. Il s’agit de proposer « autre chose », ne pas tomber dans la forme existante simpliste, se faire le reflet de son temps. L’autocritique, l’autorévision, est ce rappel constant à ne pas céder au facile, à ce qui marche, au dogmatisme, mais à explorer, proposer, non pour soi-même ou pour une quelconque recherche de gloire, mais pour avancer dans la connaissance. Elle est aussi une invitation à la pluridisciplinarité, au décloisonnement. Arguments était bien ce projet qui comportait « une ampleur de vue [19] ».

Dès 1962, Morin reprend donc sa route en publiant L’Esprit du temps. Cette étude sur la culture de masse est une manière de renouer avec le projet morinien d’une connaissance de l’humanité moderne. Il y poursuit également ce travail d’ouverture, d’exploration, justifiant la nécessité d’interroger ce phénomène dont Duvignaud dira que la planétarisation de la culture de masse

« […] ramène l’homme à sa littéralité en le plaçant face aux exigences simples de l’amour, de la mort et du bonheur. Elle se rattache par là au « devenir profond de l’humanité ». L’Esprit du temps est le premier livre de ce genre publié en France, il ouvre un domaine nouveau à l’investigation. [20] »

L’enquête sur Plozévet marque aussi la préoccupation de Morin pour la pluridisciplinarité. Cette vaste « action concertée » est amorcée en 1960. Morin y pratique une sociologie clinique aux côtés de psychosociologues comme Romain Denis, de socio-historiens comme Christian Topalov à partir de 1965. Avec la réalisation de monographies et d’entretiens, les enquêteurs entendent comprendre comment Plozévet se métamorphose. Pour Morin, c’est l’occasion de penser l’imbrication d’une société vieillie et l’apparition d’une modernité incarnée par la jeunesse et les phénomènes yéyés. C’est là l’ouverture vers une sociologie des mutations, ou vers ce que Ziegler appellera en 1973 une

« […] nouvelle anthropologie totale que Duvignaud, Balandier et Bastide ont entrevue et dont Morin aujourd’hui formule une première théorie cohérente, il n’y a plus d’ « archaïque », plus d’opposition entre les faits d’histoire et des faits non travaillés par l’histoire, plus d’antinomie enfin entre les étapes ontologiquement différentes du devenir de la vie. [21] »

Morin ouvre ainsi la voie à une sociologie hors-normes, non pas par désir de marginalité, mais par souci de vérité, cherchant à ne pas céder aux tentations circéennes des écoles, des dogmes et des spécialismes. La publication de La Métamorphose de Plodémet en 1967 déclenchera « L’Affaire Morin », sorte d’évènement caractéristique de la gêne qu’occasionne Morin dans le champ sociologique et anthropologique. Car si Morin et les enquêteurs de l’action concertée inaugurent ce qui deviendra la recherche-action et la sociologie d’intervention, il s’attire la colère d’un grand nombre de chercheurs et d’institutionnels qui ne partagent aucunement sa vision de la sociologie, tant pratique que théorique. C’est aussi là la singularité de l’œuvre morinienne, son caractère irritant pour les chapelles universitaires, qui, sans pourtant faire école, participe à leur construction, les alimente, en inaugure sans même le souhaiter.

L’École buissonnière d’Edgar Morin

« “Morinisme” ou barbarie. Tel est bien, au fond, son propos. Il y a trente ans, il avait côtoyé les anciens trotskistes qui, autour de Cornélius Castoriadis et Claude Lefort, avaient fondé Socialisme ou barbarie. Car cet intellectuel engagé dans la cité ne fait pas suffisamment école, du moins en France : penseur solitaire, il trace sa route à l’écart. Mais s’il est tellement attachant, et passionnant, c’est qu’il prend le risque d’être un intellectuel. [22] »

Voilà que l’on s’accorde à dire qu’il n’y a pas d’école morinienne. On trouve pourtant des traces de sa pensée dans de nombreux champs, de nombreux ouvrages. Morin répondait d’ailleurs à ce paradoxe d’une œuvre marginale et pourtant centrale :

« l’objet de mon travail est transdisciplinaire par nature. Et puis, si j’ai animé un séminaire à l’École des hautes études en sciences sociales durant vingt ans, je n’ai pas été titulaire d’une chaire et n’ai donc pas formé d’esprits disciplinés ! […] Je procède par dissémination ; mes livres et mes articles se répandent comme des graines et je ne sais pas lesquelles pousseront. Il existe des terres arides et des malentendus nombreux. Voyez le mot complexité associé à mon travail mais de plus en plus employé de manière simplificatrice, comme un bouche-trou et dans le sens contraire de celui qui m’intéresse ! [23] »

L’Affaire Morin, n’est pas la seule péripétie à laquelle il ait été confronté. Il semble d’ailleurs que partout où Morin s’arrête, il déclenche les ires et les inimitiés. Les situationnistes s’en prendront à lui et à ses compagnons d’Arguments dans un texte virulent, avec le style agitateur et propagandiste qu’on leur connaît, le qualifiant de penseur médiocre et s’arrogeant, par ailleurs sa notoriété [24].

Sa sociologie provoquera également de nombreuses incartades à son encontre. Si L’Esprit du temps fut salué par plusieurs intellectuels, l’ouverture de la sociologie à ce champ d’investigation n’a pas été du goût de tous. La critique de Pierre Bourdieu et de Jean-Claude Passeron fut l’une des plus célèbres, dont Morin parlera par la suite comme d’une « fatwa bourdieusienne [25] ». Morin fâche les écoles, et son style, qu’on lui reproche d’être trop souvent pétri de jeux de mots, irrite le sérieux intellectuel.

L’intérêt pour la crise de Mai 68 qui donnera lieu à l’ouvrage Mai 68. La Brèche, écrit avec son ami Claude Lefort, trouvera également son critique en Raymond Aron :

« C’est un livre qui a un premier mérite : il irrite considérablement Aron, qui voudrait entraîner avec lui, sociologue des nantis, la masse des sociologues. Aron ne peut supporter de voir de nombreux chercheurs des sciences sociales trouver une signification profonde à des évènements que lui voudrait considérer comme un petit accident. Aron s’énerve de voir Morin sympathiser avec la Commune étudiante (et peut-être de le voir le faire avec un style aussi chaleureusement enlevé – j’ai souvent détesté le style de Morin, mais on dirait que cette fois-ci le voilà éclairé par l’étincelle de l’espoir retrouvé). Aron, faiseur de leçons, est épouvanté de voir Lefort se réjouir de l’effondrement universitaire [26] »

Il semble que Morin s’amuse parfois du sort qu’on lui réserve, que « les gardes-chasse [lui] tirent dessus [27] ». Il entretient une certaine lucidité vis-à-vis de sa posture, avouant même avoir « une pulsion à me marginaliser. Je pratique un show business qui a un contenu. Mais mes idées n’ont du retentissement qu’en période de crise. [28] ». Morin n’est donc pas cet anomique que l’on pourrait voir en Jean Duvignaud, il est un déviant idéologique, lucide sur la place qu’il occupe, presque comme une fonction organique, systémique.

Sa bio-anthropologie marquera également une prise de distance avec ce que l’on peut nommer l’École Française de Socio-Anthropologie[29]. Trop évocatrice d’une sociobiologie et de ses dérives, elle fut le projet fondamental de Morin jusqu’à la fin des années 1990, sanctionnant cependant un éloignement avec ses compagnons de route Georges Balandier et Jean Duvignaud.

Ce fut peut-être autour de cette intention qu’une école morinienne s’est un moment dessinée. Il y eut l’initiative de la Fondation Royaumont puis du Centre Royaumont, formé en septembre 1970 à Paris. Vint ensuite la création du Centre International d’Études en Bio-anthropologiques et d’Anthropologie Fondamentale (CIEBAF), initiative pluridisciplinaire que Morin inaugura avec de multiples intellectuels de l’époque [30] et qui durera environ quatre ans, de 1970 à 1974. L’un des plus fidèles au projet demeure sans doute le biologiste Henri Atlan, qui aidera Morin pour l’organisation de colloques internationaux et avec lequel il partage un point de vue similaire sur la nécessité de combiner les sciences sociales et la biologie. Le Centre Royaumont est d’ailleurs conçu comme un condensé de la sociologie morinienne. On y trouve sa crisologie, l’analyse des implications, l’interdisciplinarité et l’épistémologie qu’elle suppose :

« En cette fin du 20e siècle, la science de l’homme est la plus nécessaire et la plus urgente de toutes les sciences. Elle apparaît comme une des conditions indispensables non seulement au développement, mais à la survie de l’humanité.

Toutefois, les obstacles à la constitution d’une anthropologie fondamentale demeurent considérables. La complexité du phénomène humain défie encore la méthode et la théorie. De plus, l’homme étant à la fois observateur et observé, la relation entre le sujet et l’objet de la connaissance requiert une élucidation particulière. Enfin, l’objet même de cette science, l’homme, a été morcelé et disjoint par la division institutionnelle entre sciences de la nature et sciences de l’homme. [31] »

Il se propose de constituer une recherche « hors les murs », sans se substituer aux laboratoires et institutions existants, afin de pratiquer une bio-anthropologie fondée sur le lien permanent entre biologie, sociologie et psychologie humaines.

Toujours en périphérie, mais jamais pleinement en dehors, voilà comment qualifier Morin. Car il existe un héritage morinien, des méthodes et une pensée autre que la pensée complexe trop galvaudée, que l’on retrouve disséminée de-ci de-là, caractéristique d’un fonctionnement à la « commensalité », à la « combibendalité » [32].

Morin n’est en effet pas un solitaire. Son aventure est aussi tissée par des rencontres, racontée par des compagnons de routes. Ils se convoquent les uns les autres, s’empruntent et laissent leurs empreintes. Dans le bouillonnement intellectuel des années 1960, ces penseurs, face à un rejet similaire du structuralisme et du fonctionnalisme, s’ouvrent aux mêmes phénomènes, ceux de crise, de désordre, d’anomie, de mutation[33]. Ils renouent avec les préoccupations de la sociologie et de l’anthropologie pour le changement. Georges Balandier, lorsqu’il écrit Le Désordre, semble assumer une théorie plus anthropologique et dialectique que la vision thermodynamique qu’Edgar Morin développait dans le premier tome de La Méthode.

Dès les années 1950, des intellectuels quittent le PCF. Ils commencent alors à composer une nébuleuse, informelle, innommée. Ils se voient, se connaissent, participent à des initiatives communes, politiques et scientifiques avec une idée aujourd’hui presque disparue selon laquelle les deux vont de pair. Parfois, les initiatives sont concurrentielles ou opposées. Ce sera le cas lors de la prise de position sur le droit à l’insoumission et à l’autodétermination du peuple algérien. Dionys Mascolo, Marguerite Duras, Maurice Blanchot – membres du groupe de la rue Saint-Benoît dont Morin faisait partie – mais aussi Henri Lefebvre et de nombreux autres penseurs seront signataires du Manifeste des 121. Morin n’approuvera pas et avec Roland Barthes, Jean Duvignaud et Claude Lefort, il sera signataire de la pétition initiée par la FEN, jugée moins radicale que le Manifeste car n’étant pas assez explicite sur la question de l’insoumission.

On retrouve des thématiques communes parmi tout ce groupe d’intellectuels hétérodoxes et notamment un intérêt prononcé pour la vie quotidienne, qu’il s’agisse de penseurs de la génération précédente comme Henri Lefebvre [34] ou bien de Jean Duvignaud, du cinéma-vérité de Morin et Jean Rouch.

Si l’on retient souvent ses amis d’Arguments, de Jean Duvignaud à François Fejtö en passant par Yvon Bourdet, ou Pierre Fougeyrollas, ce sont aussi des intellectuels moins notoires qui ont puisé chez Morin les sources de leurs œuvres. René Lourau, initiateur de l’Analyse Institutionnelle avec Georges Lapassade, s’appuiera sur Morin pour son analyse des implications, des actes manqués, la pratique du journal de recherche, sur Arguments pour étudier les pratiques d’autodissolution[35]. Celui qui prôna l’autocritique, écrivain méthodique de nombreux journaux de vie et de recherche (Journal de Plozévet, Journal de Californie, Une année Sisyphe…), un style qu’il nomme « anti-littéraire »[36], conserve d’ailleurs encore aujourd’hui une place importante chez les socianalystes. En posant les jalons de la recherche-action, de la sociologie d’intervention, il amena également la réflexion autour de l’implication du chercheur, à examiner ses intuitions et révéler leurs genèses au lecteur. C’est en ce sens que Samir Naïr parle de l’œuvre morinienne comme d’un exemple éclatant de sociologie qualitative, d’une « « œuvre piège » tant le rapport sujet-objet est maîtrisé, une œuvre où Morin « s’interprète en interprétant son objet »[37].

Il est effectivement possible de considérer que Morin, s’il n’a pas fait école, a pourtant laissé des écoles se former derrière lui, sur la base de ses explorations, de ses navigations dans le champ de la connaissance. Il fut un apport essentiel de la thanatologie. Fédérée autour de Louis-Vincent Thomas, la Société de Thanatologie se réclame très vite de la pensée morinienne, tant pour les thèses développées dans L’Homme et la Mort que pour son ambition pluridisciplinaire et son souhait de réinscrire l’étude du corps biologique dans les préoccupations d’une anthropologie générale et fondamentale.

« Le grand mérite d’Edgar Morin est d’avoir été le premier anthropothanatologue français. […] Le thème central de l’anthropologie morinienne consiste à relier le biologique et le socio-culturel dans une sorte anthropobiotique. Nature et culture ne sont pas séparées par une muraille mais connaissent un engrenage de continuités et de discontinuités. Rien d’étonnant si la mort se situe exactement dans la charnière bio-anthropologique. [38] »

Grâce à Arguments, Morin et Axelos ont également permis à toute une génération de rencontrer les textes d’Herbert Marcuse [39], de Theodor Adorno et d’autres penseurs de l’École de Francfort, mais aussi de Heidegger. On peut donc considérer qu’ils ont contribué d’une certaine manière au développement de la Théorie Critique en France.

Nous n’oublions pas également l’Association pour la Pensée Complexe créée par Morin et qui permit des initiatives de différentes natures [40].

Edgar Morin est donc un Ulysse, aventurier-penseur, traçant son œuvre chemin faisant, au gré de l’époque. Il se pose en penseur central du siècle bien qu’il s’exprime toujours dans les périphéries, ne souscrivant jamais pleinement aux écoles qu’il fréquente. C’est aussi un argonaute, un compagnon de route qui découvre et qui ouvre des voies nouvelles.

Si donc Morin est un marginal, il l’est finalement par méthode. Son autocritique sert toujours à ne pas se laisser happer en entretenant une autonomie de pensée, à refuser la centralité.

« Ceux qui ont en principe le moins de difficulté à accéder à la conscience décentrée/marginale sont ceux qui se trouvent marginalisés dans la société, soit que leur pensée les conduise naturellement aux idées inorthodoxes, soit que telle ou telle déviance/particularité les rejette dans les marges (être orphelin, de père inconnu, métis, métèque, homosexuel, etc.). La marginalité est un point de départ utile (non suffisant) pour l’autonomie de pensée. Mais quiconque conquiert et entretient sa propre autonomie de pensée (notamment avec l’aide de l’auto-examen/autocritique) cesse de s’identifier avec le centre du monde et devient marginal. [41] »

C’est aussi comme une manière de contrer une pulsion de reconnaissance, conscient que l’autocritique et l’auto-examen le concernent : « moi qui écris ces lignes […] [je] dois sans cesse me ressouvenir de ce que je sais et oublie, que cette œuvre, que je veux toute vouée à la connaissance et à l’humanité, est à chaque instant marquée par mon désir d’être connu et reconnu. [42]

Puisque l’on ne peut penser à l’ombre d’une chapelle, il a dû arpenter le siècle sous un soleil de plomb, comme de longues « traversées du désert » [43]. Si Morin n’a pas fait école précisément par souci de marginalité, il a tout de même su être connu et reconnu. C’est ici que Morin devient ce marginal-inclus, car, finalement, la marginalité, comme il le dit lui-même, est devenue sa propre orthodoxie [44].

Pierre-Alexandre Delorme

[1] Emmanuel Le Roy Ladurie, « Les trois naissances de l’homme », Le Nouvel Observateur, 9 juin 1973, Imec, Fonds Edgar Morin, Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, Imec/ MOR.41-2.2. Les références issues du fonds Edgar Morin conservé à l’Imec seront désormais indiquées par leur numéro de cote Imec/MOR.

[2] Patrice van Eersel, « Espérer l’imprévu », in Nouvelles clés, Hiver 2006-2007, Imec/MOR.53-3.1.

[3] Jean-Marie Brohm, « Edgar Morin et l’Universel concret », in Monde, n°4, 2008, p.40.

[4] Edgar Morin, L’île de Luna, Paris, Actes Sud, 2017, est un ouvrage que Morin écrivit dans sa jeunesse et qu’il n’a décidé de publier qu’en 2017.

[5] Jean Duvignaud, La Planète des jeunes, Paris, Stock, 1975, p.14.

[6] Jean-Baptiste Fages, Comprendre Edgar Morin, Toulouse, Éditions Privat, coll. « Pensée », 1980, p.232.

[7] Heinz Weizman, « Préface », in Edgar Morin, La Complexité humaine, Paris, Flammarion, coll. « Champs – L’essentiel », 1994, p.11.

[8] « Dans mon travail de reliance, j’ai évidemment fait appel aux idées de très nombreux chercheurs, théoriciens et penseurs, auxquels je me suis toujours plu à rendre hommage. Ainsi je me suis fait abeille, butinant mille fleurs pour faire mon miel. Et j’ai fait mon miel, justement, en intégrant, assimilant et transformant. », Edgar Morin, Itinérance. Entretien avec Marie-Christine Navarro, Paris, Arléa, 2000, p.14.

[9] Edgar Morin, « Le retour de l’évènement », in Communications, vol.18, n°1, 1972, p.6.

[10] Edgar Morin, « Pour une sociologie de la crise », in Communications, vol.12, n°1, 1968, p.4.

[11] Edgar Morin, Pour une crisologie, Paris, Éditions de L’Herne, 2016, p.18.

[12] Edgar Morin, « Psychologie de l’homme devant la mort », vers 1962, Imec/MOR.71-2.1.

[13] Edgar Morin, « Pour une sociologie de la crise », op.cit., p.6.

[14] Voir à ce propos les écrits de Rémi Hess « La transversalité de Lapassade : marginal de l’université pendant de nombreuses années, d’origine occitane, fils de paysan, homosexuel… bref une façon d’être qui lui permettait dans de nombreux milieux de jouer à merveille le rôle d’analyseur, rien que par sa seule présence. » in Rémi Hess, La socioanalyse, Paris, Éditions Universitaires, coll. « Psychothèque », 1975, p.63.

[15]. Jean-Baptiste Marongiu, « Morin, question de méthode », Libération, 2 décembre 2004, Imec/MOR.68-1.1.

[16]. Edgar Morin, La Méthode. Tome 6 : Éthique, Paris, Éditions du Seuil, 2004.

[17]. Lettre de Jean Duvignaud à Edgar Morin le 23 octobre 1960, Imec/MOR.111-5.1.

[18]. « […] je n’y retrouve plus ce qui faisait notre arguments. Trop savant, documenté, pointu, voire positiviste et par là se plaçant au niveau de toutes les revues documentées, savantes et intéressantes d’aujourd’hui. […] Il y manque une synthèse, une ampleur de vue. Tu te souviens de nos rêveries un peu folles d’il y a deux ou trois ans : elles étaient Arguments. Ce sont d’elles dont se souviennent nos amis. […] C’est par nos prises de position que nous avons touché les gens qui nous ont suivis, par cette sorte d’utopie contrôlée que nous avons provoqué nos amis à nous défendre. Non par ce que tout le monde peut trouver dans la Revue Française de Sociologie ou les Cahiers [de sociologie]. […] Sommes-nous devenus vieux ? N’avons-nous plus de rêves ? Subissons-nous la déprédation commune qui atteinte aujourd’hui tout ce qui est français ? Moi, plus je vieillis et plus il me semble qu’il devient nécessaire de faire passer ce quelque chose que nous nommerons si tu le veux l’âme, faute d’un autre mot, le courage de penser hors des normes. À contre-courant. Et non comme ces vieux professeurs que sont déjà devenus nos amis qui ne peuvent discuter entre eux sans parler de thèses ou de « travaux ». […] Mais Arguments, c’est autre chose. Qu’avons-nous à faire de nous ranger dans la hiérarchie savante ? Qu’avons-nous fait, dis-moi, de notre jeunesse ? » (souligné dans le texte). Lettre de Jean Duvignaud à Edgar Morin le 3 décembre 1961, Imec/MOR.111-5.1.

[19]. Ibid.

[20]. Jean Duvignaud, « Le Kitsch. Sur les grands boulevards de la culture de masse », L’Express, 7 juin 1962, Imec/ MOR.37-3.1. L’Esprit du temps vient de reparaître aux éditions de l’Aube, La Tour d'Aigues, 2017.

[21]. Jean Ziegler, « L’An I des sciences humaines ? Edgar Morin dénonce la pensée contre nature », 7 juin 1973, Imec/ MOR.41-2.2.

[22]. Jean-Marie Colombani, « Morinisme ou barbarie », Le Monde, 4 juin 1993, p. 25, Imec/MOR.49-3.

[23]. Lorette Coen, « Edgar Morin, braconnier du savoir », in Le Temps Samedi Culturel, 4 décembre 2004, Imec/ MOR.68-1.1.

[24] « On pourra nous objecter que nous nous occupons trop souvent de gens terriblement médiocres (qui saurait dans cinquante ans qu’Edgar Morin a jamais existé si l’on ne lisait pas cette information dans Internationale situationniste ?). », « Aux poubelles de l’Histoire ! » (tract situationniste du 21 février 1963), repris dans Guy Debord, Œuvres, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 2006, p. 627.

[25] Edgar Morin, L’Aventure de la Méthode, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Philosophie Générale », 2015, p.75.

[26] Gabriel Thoveron, « Autour de la révolution de Mai. Panorama des livres parus », in La Gauche, 7, IX, 1968, Imec/ MOR.38-3.1.

[27] Guitta Pessis-Pasternak, « Edgar Morin l’encyclopédant », in Le Point, 21 novembre 1981, Imec/ MOR.65-1.2.

[28] Jean-Claude Perrier, « Edgar Morin, le philosophe gourmand », in Jeune Afrique, n°1789, 20-26 avril 1995, Imec/MOR.51-1.1.

[29]. Salvador Juan, L’École française de socioanthropologie, Paris, Éditions Sciences Humaines, 2015.

[30]. Le comité d’initiative sera notamment composé de Cornelius Castoriadis, de John Hunt, de Claude Lefort, de Jacques Monod. Le conseil d’administration comptera entre autres Maurice Godelier, André Leroi-Gourhan, Emmanuel Le Roy-Ladurie, Claude Lévi-Strauss, Jacques Monod, Serge Moscovici.

[31]. « Brochure de présentation du Centre Royaumont », non daté, Imec/MOR.77-1.1.

[32]. Edgar Morin, Journal de Plozévet : Bretagne, 1965, Paris, Éditions de l’Aube, coll. « Mondes en cours », 2001, p. 52.

[33]. Georges Balandier (dir.), Sociologie des mutations, Paris, Éditions Anthropos, 1973.

[34]. Avec qui Morin partagea un bureau lorsqu’ils étaient au CNRS, Rémi Hess, Henri Lefebvre et l’aventure du siècle, Paris, Éditions A.M. Métailié, coll. « Traversées », 1988, p.165-166.

[35]. René Lourau, L’autodissolution des avant-gardes, Paris, Éditions Galilée, coll. « L’espace critique », 1980.

[36]. Edgar Morin, Dominique Wolton, « Grand entretien », in Hermès, La Revue. Edgar Morin aux risques d’une pensée libre, vol. 60, n°2, 2011, p.247.

[37]. Samir Naïr, « Edgar Morin », in Les Cahiers de L’Herne. Cahier Morin, Paris, Éditions de L’Herne, 2016, p.232.

[38] Louis-Vincent Thomas, « L’Homme et la Mort », in Archives de Sciences Sociales des Religions, n°43/2, 1977, p. 280-281.

[39] Malgré le fait que Morin parle souvent de Marcuse comme d’un ami, il n’y a malheureusement pas de traces de correspondances entre eux dans le fonds Edgar Morin. Ils s’étaient rencontrés lorsque Morin travaillait en Californie au Salk Institute (cf. Edgar Morin, Journal de Californie, Paris, Éditions du Seuil, 1970 ; L’Aventure de la méthode, Op.Cit., p.74 ; Emmanuel Lemieux, Edgar Morin : l’indiscipliné, Paris, Éditions du Seuil, 2009, p.471).

[40] Ceci a notamment déjà été étudié dans L’Aventure de la méthode, op. cit.

[41]. Edgar Morin, Pour sortir du XXe siècle, Paris, Éditions Fernand Nathan, coll. « Dossiers 90 », 1981, p.168.

[42]. Edgar Morin, La Méthode. Tome 2 : La vie de la vie, Paris, Éditions du Seuil, 1980.

[43]. Un terme qu’il reprend de nombreuses fois, y compris dans ses correspondances : « Je reprends une nouvelle traversée de désert, la dernière, et je pense que ma blessure sera cicatrisée dans quelques mois. » Lettre d’Edgar Morin à Edwy Plenel à propos de Une année Sisyphe, 20 octobre 1995, Imec/ MOR.51-1.2.

[44]. Edgar Morin, Le Vif du sujet, Paris, Éditions du Seuil, 1969.

Bibliographie

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