Historique
C’est en 1121 qu’une petite communauté chrétienne s’établit à Ardenne, sur un ancien lieu de culte gaulois. La nouvelle collectivité est rapidement confiée aux chanoines prémontrés de l’abbaye voisine de la Lucerne. En 1160, le petit prieuré devient une abbaye indépendante. En 1206, l’abbé d’Ardenne est élu abbé général de l’ordre de prémontré.
Le patrimoine d’Ardenne se constitue : des prieurés, des prieurés-cures ainsi que des chapelles dépendent de l’abbaye. Par exemple, le prieuré de Saint-Vincent de Lebisey, dans la paroisse voisine d’Hérouville, entre dans son patrimoine en 1291, et celui de Saint-Thomas, à Lion-sur-Mer, en 1328. L’influence de l’abbaye s’étend au-delà des communes avoisinantes : les responsables de douze cures réparties entre le Calvados et l’Orne sont nommés par Ardenne, et quatre églises paroissiales sont sous son patronage.
Durant le XVe siècle, l’abbaye souffrit moins de la guerre de Cent Ans que celles de Mondaye, La Lucerne ou Silly. Ardenne ne fut pas pour autant totalement épargnée : le 14 décembre 1417 une attaque et un pillage contraignent les moines à se réfugier en leur possession de la ville de Caen. En 1450, Caen est aux mains des Anglais. Le roi de France Charles VII, venu reprendre la ville, s’installe à Ardenne pour la durée du siège. C’est l’apogée pour l’abbaye.
Après un demi-siècle de prospérité, l’abbaye d’Ardenne entre dans une longue période de décadence. En effet, le régime de la commende s’instaure à Ardenne : l’abbaye passe sous l’autorité d’une personne extérieure à l’ordre. Ce régime a finalement privé les chanoines d’une grande partie de leurs ressources, au profit de commendataires peu soucieux de l’entretien de l’abbaye. Les guerres de religion accentueront la précarité d’Ardenne : par deux fois les Prémontrés trouvent refuge derrière les murs de Caen. L’abbatiale fut saccagée et profanée, elle servit d’étable et les lieux restèrent ouverts aux intempéries. Deux procès-verbaux conservés aux Archives départementales du Calvados décrivent les « ruynes, démollicions, dégradements et pilleryes » subis en 1562, et concluent que « pour réparer, n’y suffiroyt le revenu de vingt années de la dicte abbaye ». Et jusqu’à la fin du XVIe siècle, l’abbaye reste à l’état de ruines, quelques religieux y vivent tant bien que mal.